Jésus, maître du sabbat(A)

Un jour de sabbat[a], Jésus traversait des champs de blé. Ses disciples cueillaient des épis et, après les avoir frottés dans leurs mains, en mangeaient les grains[b].

Des pharisiens dirent : Pourquoi faites-vous ce qui est interdit le jour du sabbat ?

Jésus prit la parole et leur dit : N’avez-vous pas lu ce qu’a fait David lorsque lui et ses compagnons eurent faim ? Il est entré dans le sanctuaire de Dieu, a pris les pains exposés devant Dieu et en a mangé, puis il en a donné à ses hommes, alors que seuls les prêtres ont le droit d’en manger.

Et il ajouta : Le Fils de l’homme est maître du sabbat.

(Mt 12.9-14 ; Mc 3.1-6)

Un autre jour de sabbat, Jésus entra dans la synagogue et commença à enseigner. Or, il y avait là un homme dont la main droite était paralysée. Les spécialistes de la Loi et les pharisiens surveillaient attentivement Jésus pour voir s’il ferait une guérison le jour du sabbat : ils espéraient ainsi trouver un motif d’accusation contre lui.

Mais Jésus, sachant ce qu’ils méditaient, dit à l’homme qui avait la main infirme : Lève-toi et tiens-toi là, au milieu !

L’homme se leva et se tint debout.

Alors Jésus s’adressa aux autres : J’ai une question à vous poser : Est-il permis, le jour du sabbat, de faire du bien, ou de faire du mal ? Est-il permis de sauver une vie ou bien faut-il la laisser périr ?

10 Il balaya alors l’assistance du regard, puis il dit à cet homme[c] : Etends la main !

Ce qu’il fit. Et sa main fut guérie. 11 Les spécialistes de la Loi et les pharisiens furent remplis de fureur et se mirent à discuter entre eux sur ce qu’ils pourraient entreprendre contre Jésus.

Le choix des apôtres(B)

12 Vers cette même époque, Jésus se retira sur une colline pour prier. Il passa toute la nuit à prier Dieu. 13 A l’aube, il appela ses disciples auprès de lui et choisit douze d’entre eux, qu’il nomma apôtres : 14 Simon, qu’il appela Pierre, André, son frère, Jacques, Jean, Philippe, Barthélemy, 15 Matthieu, Thomas, Jacques, fils d’Alphée, Simon le Zélé[d], 16 Jude, fils de Jacques, et Judas l’Iscariot qui finit par le trahir.

Jésus parmi la foule(C)

17 En descendant avec eux de la colline, Jésus s’arrêta sur un plateau où se trouvaient un grand nombre de ses disciples, ainsi qu’une foule immense venue de toute la Judée, de Jérusalem et de la région littorale de Tyr et de Sidon[e]. 18 Tous étaient venus pour l’entendre et pour être guéris de leurs maladies. Ceux qui étaient tourmentés par des esprits mauvais étaient délivrés. 19 Tout le monde cherchait à le toucher, parce qu’une puissance sortait de lui et guérissait tous les malades.

Bonheur ou malheur(D)

20 Alors Jésus, regardant ses disciples, dit :

Heureux vous qui êtes pauvres,
car le royaume de Dieu vous appartient.
21 Heureux êtes-vous, vous qui maintenant avez faim,
car vous serez rassasiés.
Heureux vous qui maintenant pleurez,
car vous rirez.
22 Heureux serez-vous quand les hommes vous haïront,
vous rejetteront, vous insulteront,
vous chasseront en vous accusant de toutes sortes de maux
à cause du Fils de l’homme.

23 Quand cela arrivera, réjouissez-vous et sautez de joie, car une magnifique récompense vous attend dans le ciel. En effet, c’est bien de la même manière que leurs ancêtres ont traité les prophètes.

24 Mais malheur à vous qui possédez des richesses,
car vous avez déjà reçu toute la consolation que vous pouvez attendre.
25 Malheur à vous qui, maintenant, avez tout à satiété,
car vous aurez faim !
Malheur à vous qui maintenant riez,
car vous connaîtrez le deuil et les larmes.
26 Malheur à vous quand tous les hommes diront du bien de vous,
car c’est de la même manière que leurs ancêtres ont traité les faux prophètes.

L’amour pour les autres(E)

27 Quant à vous tous qui m’écoutez, voici ce que je vous dis : Aimez vos ennemis ; faites du bien à ceux qui vous haïssent ; 28 appelez la bénédiction divine sur ceux qui vous maudissent ; priez pour ceux qui vous calomnient. 29 Si quelqu’un te gifle sur une joue, présente-lui aussi l’autre. Si quelqu’un te prend ton manteau, ne l’empêche pas de prendre aussi ta chemise. 30 Donne à tous ceux qui te demandent, et si quelqu’un te prend ce qui t’appartient, n’exige pas qu’il te le rende.

31 Faites pour les autres ce que vous voudriez qu’ils fassent pour vous. 32 Si vous aimez seulement ceux qui vous aiment, pensez-vous avoir droit à une reconnaissance particulière ? Les pécheurs aiment aussi leurs amis. 33 Et si vous faites du bien seulement à ceux qui vous en font, pourquoi vous attendriez-vous à de la reconnaissance ? Les pécheurs n’agissent-ils pas de même ? 34 Si vous prêtez seulement à ceux dont vous espérez être remboursés, quelle reconnaissance vous doit-on ? Les pécheurs aussi se prêtent entre eux pour être remboursés.

35 Vous, au contraire, aimez vos ennemis, faites-leur du bien et prêtez sans espoir de retour. Alors votre récompense sera grande, vous serez les fils du Très-Haut, parce qu’il est lui-même bon pour les ingrats et les méchants.

36 Votre Père est plein de bonté. Soyez donc bons comme lui.

(Mt 7.1-5)

37 Ne vous posez pas en juges d’autrui, et vous ne serez pas vous-mêmes jugés. Gardez-vous de condamner les autres, et, à votre tour, vous ne serez pas condamnés. Pardonnez, et vous serez vous-mêmes pardonnés. 38 Donnez, et l’on vous donnera, on versera dans le pan de votre vêtement une bonne mesure bien tassée, secouée et débordante ; car on emploiera, à votre égard, la mesure dont vous vous serez servis pour mesurer.

39 Il ajouta cette comparaison : Un aveugle peut-il guider un autre aveugle ? Ne vont-ils pas tous les deux tomber dans le fossé ?

40 Le disciple n’est pas plus grand que celui qui l’enseigne ; mais tout disciple bien formé sera comme son maître.

41 Pourquoi vois-tu les grains de sciure dans l’œil de ton frère, alors que tu ne remarques pas la poutre qui est dans le tien ? 42 Comment peux-tu dire à ton frère : « Frère, laisse-moi enlever cette sciure que tu as dans l’œil », alors que tu ne remarques pas la poutre qui est dans le tien ? Hypocrite ! Commence donc par retirer la poutre de ton œil ; alors tu y verras assez clair pour ôter la sciure de l’œil de ton frère.

(Mt 7.16-20)

43 Un bon arbre ne peut pas porter de mauvais fruits, ni un mauvais arbre de bons fruits. 44 En effet, chaque arbre se reconnaît à ses fruits. On ne cueille pas de figues sur des chardons, et on ne récolte pas non plus du raisin sur des ronces. 45 L’homme qui est bon tire le bien du bon trésor de son cœur ; celui qui est mauvais tire le mal de son mauvais fonds. Ce qu’on dit vient de ce qui remplit le cœur.

Vrai et faux disciple(F)

46 Pourquoi m’appelez-vous « Seigneur ! Seigneur ! » alors que vous n’accomplissez pas ce que je vous commande ?

47 Savez-vous à qui ressemble celui qui vient à moi, qui écoute mes paroles et les applique ? C’est ce que je vais vous montrer. 48 Il ressemble à un homme qui a bâti une maison : il a creusé, il est allé profond et il a assis les fondations sur le roc. Quand le fleuve a débordé, les eaux se sont jetées avec violence contre la maison, mais elles n’ont pas pu l’ébranler, parce qu’elle était construite selon les règles de l’art.

49 Mais celui qui écoute mes paroles sans les appliquer ressemble à un homme qui a construit sa maison directement sur la terre meuble, sans fondations ; dès que les eaux du fleuve se sont jetées contre elle, la maison s’est effondrée, et il n’en est resté qu’un grand tas de ruines.

La victoire sur la mort(G)

Après avoir dit au peuple tout ce qu’il avait à lui dire, Jésus se rendit à Capernaüm.

Un officier romain avait un esclave malade, qui était sur le point de mourir. Or, son maître tenait beaucoup à lui. Quand il entendit parler de Jésus, l’officier envoya auprès de lui quelques responsables juifs pour le supplier de venir guérir son esclave. Ils vinrent trouver Jésus et ils le prièrent instamment : Cet homme, disaient-ils, mérite vraiment que tu lui accordes cette faveur. En effet, il aime notre peuple : il a même fait bâtir notre synagogue à ses frais.

Jésus partit avec eux. Il n’était plus qu’à une faible distance de la maison quand l’officier envoya des amis pour lui dire : Seigneur, ne te donne pas tant de peine, car je ne remplis pas les conditions[f] pour te recevoir dans ma maison. C’est la raison pour laquelle je n’ai pas osé venir en personne te trouver. Mais, dis un mot et mon serviteur sera guéri. Car, moi-même, je suis un officier subalterne, mais j’ai des soldats sous mes ordres, et quand je dis à l’un : « Va ! », il va. Quand je dis à un autre : « Viens ! », il vient. Quand je dis à mon esclave : « Fais ceci ! », il le fait.

En entendant ces paroles, Jésus fut rempli d’admiration pour cet officier : il se tourna vers la foule qui le suivait et dit : Je vous l’assure, nulle part en Israël, je n’ai trouvé une telle foi !

10 Les envoyés de l’officier s’en retournèrent alors à la maison où ils trouvèrent l’esclave en bonne santé.

11 Ensuite[g], Jésus se rendit dans une ville appelée Naïn[h]. Ses disciples et une grande foule l’accompagnaient. 12 Comme il arrivait à la porte de la ville, il rencontra un convoi funèbre : on enterrait le fils unique d’une veuve. Beaucoup d’habitants de la ville suivaient le cortège. 13 Le Seigneur vit la veuve et il fut pris de pitié pour elle ; il lui dit : Ne pleure pas !

14 Puis il s’approcha de la civière et posa sa main sur elle. Les porteurs s’arrêtèrent.

– Jeune homme, dit-il, je te l’ordonne, lève-toi !

15 Le mort se redressa, s’assit et se mit à parler. Jésus le rendit à sa mère. 16 Saisis d’une profonde crainte, tous les assistants louaient Dieu et disaient : Un grand prophète est apparu parmi nous !

Et ils ajoutaient : Dieu est venu prendre soin de son peuple !

17 Cette déclaration concernant Jésus se répandit dans toute la Judée et dans les régions environnantes.

Jésus et Jean-Baptiste(H)

18 Jean fut informé par ses disciples de tout ce qui se passait. Il appela alors deux d’entre eux 19 et les envoya auprès du Seigneur pour demander : Es-tu celui qui devait venir[i], ou bien devons-nous en attendre un autre ?

20 Ces hommes se présentèrent à Jésus et lui dirent : C’est Jean-Baptiste qui nous envoie. Voici ce qu’il te fait demander : « Es-tu celui qui devait venir, ou bien devons-nous en attendre un autre ? »

21 Or, au moment où ils arrivaient, Jésus guérit plusieurs personnes de diverses maladies et infirmités. Il délivra des gens qui étaient sous l’emprise d’esprits mauvais et rendit la vue à plusieurs aveugles. 22 Il répondit alors aux envoyés : Retournez auprès de Jean et racontez-lui ce que vous avez vu et entendu : les aveugles voient, les paralysés marchent normalement, les lépreux sont purifiés, les sourds entendent, les morts ressuscitent, la Bonne Nouvelle est annoncée aux pauvres[j]. 23 Heureux celui qui ne perdra pas la foi à cause de moi !

24 Après le départ des messagers de Jean, Jésus saisit cette occasion pour parler de Jean à la foule : Qu’êtes-vous allés voir au désert ? Un roseau agité çà et là par le vent ? 25 Qui donc êtes-vous allés voir ? Un homme habillé avec élégance ? Ceux qui portent des habits somptueux et qui vivent dans le luxe habitent les palais royaux. 26 Mais qu’êtes-vous donc allés voir au désert ? Un prophète ? Oui, assurément, et même bien plus qu’un prophète, c’est moi qui vous le dis. 27 Car c’est celui dont il est écrit :

J’enverrai mon messager devant toi,
il te préparera le chemin[k] .

28 Je vous l’assure : parmi tous les hommes qui sont nés d’une femme, il n’y en a pas de plus grand que Jean. Et pourtant, le plus petit dans le royaume de Dieu est plus grand que lui.

(Mt 11.16-19)

29 Tous les gens du peuple et tous les collecteurs d’impôts qui ont écouté le message de Jean et se sont fait baptiser par lui ont reconnu que Dieu est juste. 30 Mais les pharisiens et les enseignants de la Loi, qui ont refusé de se faire baptiser par lui, ont rejeté la volonté de Dieu à leur égard.

31 A qui donc pourrais-je comparer les gens de notre temps ? A qui ressemblent-ils ? 32 Ils sont comme des enfants assis sur la place du marché qui se crient les uns aux autres :

Quand nous avons joué de la flûte,
vous n’avez pas dansé !
Et quand nous avons chanté des airs de deuil,
vous ne vous êtes pas mis à pleurer !

33 En effet, Jean-Baptiste est venu, il ne mangeait pas de pain, il ne buvait pas de vin. Qu’avez-vous dit alors ? « Il a un démon en lui ! ».

34 Le Fils de l’homme est venu, il mange et boit, et vous vous écriez : « Cet homme ne pense qu’à faire bonne chère et à boire du vin, il est l’ami des collecteurs d’impôts et des pécheurs notoires. »

35 Cependant, la sagesse de Dieu est reconnue comme telle par ceux qui la reçoivent.

L’amour, fruit du pardon

36 Un pharisien invita Jésus à manger. Jésus se rendit chez lui et se mit à table. 37 Survint une femme connue dans la ville pour sa vie dissolue. Comme elle avait appris que Jésus mangeait chez le pharisien, elle avait apporté un flacon d’albâtre[l] rempli de parfum. 38 Elle se tint derrière lui, à ses pieds[m]. Elle pleurait ; elle se mit à mouiller de ses larmes les pieds de Jésus ; alors elle les essuya avec ses cheveux et, en les embrassant, elle versait le parfum sur eux.

39 En voyant cela, le pharisien qui l’avait invité se dit : Si cet homme était vraiment un prophète, il saurait quelle est cette femme qui le touche, que c’est quelqu’un qui mène une vie dissolue.

40 Jésus lui répondit à haute voix : Simon, j’ai quelque chose à te dire.

– Oui, Maître, parle, répondit le pharisien.

41 – Il était une fois un prêteur à qui deux hommes devaient de l’argent. Le premier devait cinq cents pièces d’argent ; le second cinquante[n]. 42 Comme ni l’un ni l’autre n’avaient de quoi rembourser leur dette, il fit cadeau à tous deux de ce qu’ils lui devaient. A ton avis, lequel des deux l’aimera le plus ?

43 Simon répondit : Celui, je suppose, auquel il aura remis la plus grosse dette.

– Voilà qui est bien jugé, lui dit Jésus.

44 Puis, se tournant vers la femme, il reprit : Tu vois cette femme ? Eh bien, quand je suis entré dans ta maison, tu ne m’as pas apporté d’eau pour me laver les pieds[o] ; mais elle, elle me les a arrosés de ses larmes et les a essuyés avec ses cheveux. 45 Tu ne m’as pas accueilli en m’embrassant, mais elle, depuis que je suis entré, elle n’a cessé de couvrir mes pieds de baisers. 46 Tu n’as pas versé d’huile parfumée sur ma tête, mais elle, elle a versé du parfum sur mes pieds. 47 C’est pourquoi je te le dis : ses nombreux péchés lui ont été pardonnés, c’est pour cela qu’elle m’a témoigné tant d’amour. Mais celui qui a eu peu de choses à se faire pardonner ne manifeste que peu d’amour !

48 Puis il dit à la femme : Tes péchés te sont pardonnés.

49 Les autres invités se dirent en eux-mêmes : « Qui est donc cet homme qui ose pardonner les péchés ? »

50 Mais Jésus dit à la femme : Parce que tu as cru en moi, tu es sauvée ; va en paix.

Footnotes

  1. 6.1 Certains manuscrits ont : un second sabbat du premier mois, sabbat qui est proche de la moisson.
  2. 6.1 Voir Dt 23.26.
  3. 6.10 Certains manuscrits portent : puis il dit avec colère à cet homme.
  4. 6.15 Voir note Mt 10.4.
  5. 6.17 Tyr et Sidon étaient deux ports phéniciens des bords de la Méditerranée, au nord-ouest du pays d’Israël.
  6. 7.6 Ou : je ne suis pas digne. Voir Mt 8.8.
  7. 7.11 Certains manuscrits ont : le lendemain.
  8. 7.11 Ville du sud-est de la Galilée, à une douzaine de kilomètres de Nazareth.
  9. 7.19 Voir Mt 11.3 et la note.
  10. 7.22 Es 35.5 ; 61.1.
  11. 7.27 Ml 3.1.
  12. 7.37 Pierre blanchâtre dans laquelle on taillait des vases à parfum.
  13. 7.38 Comme dans toute l’Antiquité, les invités étaient allongés sur des sortes de divans, les pieds vers l’extérieur du cercle.
  14. 7.41 Il s’agit de deniers. Le denier représentait le salaire journalier d’un ouvrier agricole.
  15. 7.44 Ce que les règles de l’hospitalité lui suggéraient.