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38 L'Éternel répondit à Job du milieu de la tempête et dit:

Qui est celui qui obscurcit mes desseins Par des discours sans intelligence?

Ceins tes reins comme un vaillant homme; Je t'interrogerai, et tu m'instruiras.

Où étais-tu quand je fondais la terre? Dis-le, si tu as de l'intelligence.

Qui en a fixé les dimensions, le sais-tu? Ou qui a étendu sur elle le cordeau?

Sur quoi ses bases sont-elles appuyées? Ou qui en a posé la pierre angulaire,

Alors que les étoiles du matin éclataient en chants d'allégresse, Et que tous les fils de Dieu poussaient des cris de joie?

Qui a fermé la mer avec des portes, Quand elle s'élança du sein maternel;

Quand je fis de la nuée son vêtement, Et de l'obscurité ses langes;

10 Quand je lui imposai ma loi, Et que je lui mis des barrières et des portes;

11 Quand je dis: Tu viendras jusqu'ici, tu n'iras pas au delà; Ici s'arrêtera l'orgueil de tes flots?

12 Depuis que tu existes, as-tu commandé au matin? As-tu montré sa place à l'aurore,

13 Pour qu'elle saisisse les extrémités de la terre, Et que les méchants en soient secoués;

14 Pour que la terre se transforme comme l'argile qui reçoit une empreinte, Et qu'elle soit parée comme d'un vêtement;

15 Pour que les méchants soient privés de leur lumière, Et que le bras qui se lève soit brisé?

16 As-tu pénétré jusqu'aux sources de la mer? T'es-tu promené dans les profondeurs de l'abîme?

17 Les portes de la mort t'ont-elles été ouvertes? As-tu vu les portes de l'ombre de la mort?

18 As-tu embrassé du regard l'étendue de la terre? Parle, si tu sais toutes ces choses.

19 Où est le chemin qui conduit au séjour de la lumière? Et les ténèbres, où ont-elles leur demeure?

20 Peux-tu les saisir à leur limite, Et connaître les sentiers de leur habitation?

21 Tu le sais, car alors tu étais né, Et le nombre de tes jours est grand!

22 Es-tu parvenu jusqu'aux amas de neige? As-tu vu les dépôts de grêle,

23 Que je tiens en réserve pour les temps de détresse, Pour les jours de guerre et de bataille?

24 Par quel chemin la lumière se divise-t-elle, Et le vent d'orient se répand-il sur la terre?

25 Qui a ouvert un passage à la pluie, Et tracé la route de l'éclair et du tonnerre,

26 Pour que la pluie tombe sur une terre sans habitants, Sur un désert où il n'y a point d'hommes;

27 Pour qu'elle abreuve les lieux solitaires et arides, Et qu'elle fasse germer et sortir l'herbe?

28 La pluie a-t-elle un père? Qui fait naître les gouttes de la rosée?

29 Du sein de qui sort la glace, Et qui enfante le frimas du ciel,

30 Pour que les eaux se cachent comme une pierre, Et que la surface de l'abîme soit enchaînée?

31 Noues-tu les liens des Pléiades, Ou détaches-tu les cordages de l'Orion?

32 Fais-tu paraître en leur temps les signes du zodiaque, Et conduis-tu la Grande Ourse avec ses petits?

33 Connais-tu les lois du ciel? Règles-tu son pouvoir sur la terre?

34 Élèves-tu la voix jusqu'aux nuées, Pour appeler à toi des torrents d'eaux?

35 Lances-tu les éclairs? Partent-ils? Te disent-ils: Nous voici?

36 Qui a mis la sagesse dans le coeur, Ou qui a donné l'intelligence à l'esprit?

37 Qui peut avec sagesse compter les nuages, Et verser les outres des cieux,

38 Pour que la poussière se mette à ruisseler, Et que les mottes de terre se collent ensemble?

39 (39:1) Chasses-tu la proie pour la lionne, Et apaises-tu la faim des lionceaux,

40 (39:2) Quand ils sont couchés dans leur tanière, Quand ils sont en embuscade dans leur repaire?

41 (39:3) Qui prépare au corbeau sa pâture, Quand ses petits crient vers Dieu, Quand ils sont errants et affamés?

39 (39:4) Sais-tu quand les chèvres sauvages font leurs petits? Observes-tu les biches quand elles mettent bas?

(39:5) Comptes-tu les mois pendant lesquels elles portent, Et connais-tu l'époque où elles enfantent?

(39:6) Elles se courbent, laissent échapper leur progéniture, Et sont délivrées de leurs douleurs.

(39:7) Leurs petits prennent de la vigueur et grandissent en plein air, Ils s'éloignent et ne reviennent plus auprès d'elles.

(39:8) Qui met en liberté l'âne sauvage, Et l'affranchit de tout lien?

(39:9) J'ai fait du désert son habitation, De la terre salée sa demeure.

(39:10) Il se rit du tumulte des villes, Il n'entend pas les cris d'un maître.

(39:11) Il parcourt les montagnes pour trouver sa pâture, Il est à la recherche de tout ce qui est vert.

(39:12) Le buffle veut-il être à ton service? Passe-t-il la nuit vers ta crèche?

10 (39:13) L'attaches-tu par une corde pour qu'il trace un sillon? Va-t-il après toi briser les mottes des vallées?

11 (39:14) Te reposes-tu sur lui, parce que sa force est grande? Lui abandonnes-tu le soin de tes travaux?

12 (39:15) Te fies-tu à lui pour la rentrée de ta récolte? Est-ce lui qui doit l'amasser dans ton aire?

13 (39:16) L'aile de l'autruche se déploie joyeuse; On dirait l'aile, le plumage de la cigogne.

14 (39:17) Mais l'autruche abandonne ses oeufs à la terre, Et les fait chauffer sur la poussière;

15 (39:18) Elle oublie que le pied peut les écraser, Qu'une bête des champs peut les fouler.

16 (39:19) Elle est dure envers ses petits comme s'ils n'étaient point à elle; Elle ne s'inquiète pas de l'inutilité de son enfantement.

17 (39:20) Car Dieu lui a refusé la sagesse, Il ne lui a pas donné l'intelligence en partage.

18 (39:21) Quand elle se lève et prend sa course, Elle se rit du cheval et de son cavalier.

19 (39:22) Est-ce toi qui donnes la vigueur au cheval, Et qui revêts son cou d'une crinière flottante?

20 (39:23) Le fais-tu bondir comme la sauterelle? Son fier hennissement répand la terreur.

21 (39:24) Il creuse le sol et se réjouit de sa force, Il s'élance au-devant des armes;

22 (39:25) Il se rit de la crainte, il n'a pas peur, Il ne recule pas en face de l'épée.

23 (39:26) Sur lui retentit le carquois, Brillent la lance et le javelot.

24 (39:27) Bouillonnant d'ardeur, il dévore la terre, Il ne peut se contenir au bruit de la trompette.

25 (39:28) Quand la trompette sonne, il dit: En avant! Et de loin il flaire la bataille, La voix tonnante des chefs et les cris de guerre.

26 (39:29) Est-ce par ton intelligence que l'épervier prend son vol, Et qu'il étend ses ailes vers le midi?

27 (39:30) Est-ce par ton ordre que l'aigle s'élève, Et qu'il place son nid sur les hauteurs?

28 (39:31) C'est dans les rochers qu'il habite, qu'il a sa demeure, Sur la cime des rochers, sur le sommet des monts.

29 (39:32) De là il épie sa proie, Il plonge au loin les regards.

30 (39:33) Ses petits boivent le sang; Et là où sont des cadavres, l'aigle se trouve.

40 (39:34) L'Éternel, s'adressant à Job, dit:

(39:35) Celui qui dispute contre le Tout Puissant est-il convaincu? Celui qui conteste avec Dieu a-t-il une réplique à faire?

(39:36) Job répondit à l'Éternel et dit:

(39:37) Voici, je suis trop peu de chose; que te répliquerais-je? Je mets la main sur ma bouche.

(39:38) J'ai parlé une fois, je ne répondrai plus; Deux fois, je n'ajouterai rien.

(40:1) L'Éternel répondit à Job du milieu de la tempête et dit:

(40:2) Ceins tes reins comme un vaillant homme; Je t'interrogerai, et tu m'instruiras.

(40:3) Anéantiras-tu jusqu'à ma justice? Me condamneras-tu pour te donner droit?

(40:4) As-tu un bras comme celui de Dieu, Une voix tonnante comme la sienne?

10 (40:5) Orne-toi de magnificence et de grandeur, Revêts-toi de splendeur et de gloire!

11 (40:6) Répands les flots de ta colère, Et d'un regard abaisse les hautains!

12 (40:7) D'un regard humilie les hautains, Écrase sur place les méchants,

13 (40:8) Cache-les tous ensemble dans la poussière, Enferme leur front dans les ténèbres!

14 (40:9) Alors je rends hommage A la puissance de ta droite.

15 (40:10) Voici l'hippopotame, à qui j'ai donné la vie comme à toi! Il mange de l'herbe comme le boeuf.

16 (40:11) Le voici! Sa force est dans ses reins, Et sa vigueur dans les muscles de son ventre;

17 (40:12) Il plie sa queue aussi ferme qu'un cèdre; Les nerfs de ses cuisses sont entrelacés;

18 (40:13) Ses os sont des tubes d'airain, Ses membres sont comme des barres de fer.

19 (40:14) Il est la première des oeuvres de Dieu; Celui qui l'a fait l'a pourvu d'un glaive.

20 (40:15) Il trouve sa pâture dans les montagnes, Où se jouent toutes les bêtes des champs.

21 (40:16) Il se couche sous les lotus, Au milieu des roseaux et des marécages;

22 (40:17) Les lotus le couvrent de leur ombre, Les saules du torrent l'environnent.

23 (40:18) Que le fleuve vienne à déborder, il ne s'enfuit pas: Que le Jourdain se précipite dans sa gueule, il reste calme.

24 (40:19) Est-ce à force ouverte qu'on pourra le saisir? Est-ce au moyen de filets qu'on lui percera le nez?

41 (40:20) Prendras-tu le crocodile à l'hameçon? Saisiras-tu sa langue avec une corde?

(40:21) Mettras-tu un jonc dans ses narines? Lui perceras-tu la mâchoire avec un crochet?

(40:22) Te pressera-t-il de supplication? Te parlera-t-il d'une voix douce?

(40:23) Fera-t-il une alliance avec toi, Pour devenir à toujours ton esclave?

(40:24) Joueras-tu avec lui comme avec un oiseau? L'attacheras-tu pour amuser tes jeunes filles?

(40:25) Les pêcheurs en trafiquent-ils? Le partagent-ils entre les marchands?

(40:26) Couvriras-tu sa peau de dards, Et sa tête de harpons?

(40:27) Dresse ta main contre lui, Et tu ne t'aviseras plus de l'attaquer.

(40:28) Voici, on est trompé dans son attente; A son seul aspect n'est-on pas terrassé?

10 (41:1) Nul n'est assez hardi pour l'exciter; Qui donc me résisterait en face?

11 (41:2) De qui suis-je le débiteur? Je le paierai. Sous le ciel tout m'appartient.

12 (41:3) Je veux encore parler de ses membres, Et de sa force, et de la beauté de sa structure.

13 (41:4) Qui soulèvera son vêtement? Qui pénétrera entre ses mâchoires?

14 (41:5) Qui ouvrira les portes de sa gueule? Autour de ses dents habite la terreur.

15 (41:6) Ses magnifiques et puissants boucliers Sont unis ensemble comme par un sceau;

16 (41:7) Ils se serrent l'un contre l'autre, Et l'air ne passerait pas entre eux;

17 (41:8) Ce sont des frères qui s'embrassent, Se saisissent, demeurent inséparables.

18 (41:9) Ses éternuements font briller la lumière; Ses yeux sont comme les paupières de l'aurore.

19 (41:10) Des flammes jaillissent de sa bouche, Des étincelles de feu s'en échappent.

20 (41:11) Une fumée sort de ses narines, Comme d'un vase qui bout, d'une chaudière ardente.

21 (41:12) Son souffle allume les charbons, Sa gueule lance la flamme.

22 (41:13) La force a son cou pour demeure, Et l'effroi bondit au-devant de lui.

23 (41:14) Ses parties charnues tiennent ensemble, Fondues sur lui, inébranlables.

24 (41:15) Son coeur est dur comme la pierre, Dur comme la meule inférieure.

25 (41:16) Quand il se lève, les plus vaillants ont peur, Et l'épouvante les fait fuir.

26 (41:17) C'est en vain qu'on l'attaque avec l'épée; La lance, le javelot, la cuirasse, ne servent à rien.

27 (41:18) Il regarde le fer comme de la paille, L'airain comme du bois pourri.

28 (41:19) La flèche ne le met pas en fuite, Les pierres de la fronde sont pour lui du chaume.

29 (41:20) Il ne voit dans la massue qu'un brin de paille, Il rit au sifflement des dards.

30 (41:21) Sous son ventre sont des pointes aiguës: On dirait une herse qu'il étend sur le limon.

31 (41:22) Il fait bouillir le fond de la mer comme une chaudière, Il l'agite comme un vase rempli de parfums.

32 (41:23) Il laisse après lui un sentier lumineux; L'abîme prend la chevelure d'un vieillard.

33 (41:24) Sur la terre nul n'est son maître; Il a été créé pour ne rien craindre.

34 (41:25) Il regarde avec dédain tout ce qui est élevé, Il est le roi des plus fiers animaux.

42 Job répondit à l'Éternel et dit:

Je reconnais que tu peux tout, Et que rien ne s'oppose à tes pensées.

Quel est celui qui a la folie d'obscurcir mes desseins? -Oui, j'ai parlé, sans les comprendre, De merveilles qui me dépassent et que je ne conçois pas.

Écoute-moi, et je parlerai; Je t'interrogerai, et tu m'instruiras.

Mon oreille avait entendu parler de toi; Mais maintenant mon oeil t'a vu.

C'est pourquoi je me condamne et je me repens Sur la poussière et sur la cendre.

Après que l'Éternel eut adressé ces paroles à Job, il dit à Éliphaz de Théman: Ma colère est enflammée contre toi et contre tes deux amis, parce que vous n'avez pas parlé de moi avec droiture comme l'a fait mon serviteur Job.

Prenez maintenant sept taureaux et sept béliers, allez auprès de mon serviteur Job, et offrez pour vous un holocauste. Job, mon serviteur, priera pour vous, et c'est par égard pour lui seul que je ne vous traiterai pas selon votre folie; car vous n'avez pas parlé de moi avec droiture, comme l'a fait mon serviteur Job.

Éliphaz de Théman, Bildad de Schuach, et Tsophar de Naama allèrent et firent comme l'Éternel leur avait dit: et l'Éternel eut égard à la prière de Job.

10 L'Éternel rétablit Job dans son premier état, quand Job eut prié pour ses amis; et l'Éternel lui accorda le double de tout ce qu'il avait possédé.

11 Les frères, les soeurs, et les anciens amis de Job vinrent tous le visiter, et ils mangèrent avec lui dans sa maison. Ils le plaignirent et le consolèrent de tous les malheurs que l'Éternel avait fait venir sur lui, et chacun lui donna un kesita et un anneau d'or.

12 Pendant ses dernières années, Job reçut de l'Éternel plus de bénédictions qu'il n'en avait reçu dans les premières. Il posséda quatorze mille brebis, six mille chameaux, mille paires de boeufs, et mille ânesses.

13 Il eut sept fils et trois filles:

14 il donna à la première le nom de Jemima, à la seconde celui de Ketsia, et à la troisième celui de Kéren Happuc.

15 Il n'y avait pas dans tout le pays d'aussi belles femmes que les filles de Job. Leur père leur accorda une part d'héritage parmi leurs frères.

16 Job vécut après cela cent quarante ans, et il vit ses fils et les fils de ses fils jusqu'à la quatrième génération.

17 Et Job mourut âgé et rassasié de jours.

Premier discours de Dieu

Dieu évoque son œuvre de création et sa providence

38 Alors, du sein de la tempête, l’Eternel répondit à Job :

Qui donc obscurcit mes desseins
par des discours sans connaissance ?
Mets ta ceinture, comme un brave :
je vais te poser des questions |et tu m’enseigneras[a].

Où étais-tu quand je posai |les fondations du monde[b] ?
Déclare-le, |puisque ta science est si profonde !
Qui en a fixé les mesures, |le sais-tu donc ?
Qui a tendu sur lui |le cordeau d’arpenteur ?
Dans quoi les socles |de ses colonnes |s’enfoncent-ils ?
Qui en posa |la pierre principale d’angle,
quand les étoiles du matin[c] |éclataient, unanimes, |dans des chants d’allégresse,
et que tous les anges de Dieu[d] |poussaient des cris de joie ?

Qui enferma la mer |par une porte à deux battants
lorsqu’elle jaillit du sein maternel ?
lorsque je fis, de la nuée, |son vêtement,
et de l’obscurité ses langes,
10 quand je lui imposai ma loi,
quand je plaçai verrous et portes
11 en lui disant : |« C’est jusqu’ici que tu iras, |et pas plus loin,
ici s’arrêteront |tes flots impétueux » ?

12 As-tu, un seul jour de ta vie, |commandé au matin
et assigné sa place à l’aube
13 pour qu’elle se saisisse |des extrémités de la terre
et qu’elle en secoue les méchants[e] ?
14 Alors, la terre est transformée |comme l’argile sous l’empreinte[f],
et toutes choses sont parées |comme d’un vêtement.
15 Mais les méchants |se voient privés de leur lumière
et le bras levé est brisé.

16 Es-tu parvenu jusqu’aux sources |qui font jaillir les mers ?
Ou t’es-tu promené |dans les profondeurs de l’abîme ?
17 Les portes de la mort |ont-elles paru devant toi ?
As-tu vu les accès |du royaume des épaisses ténèbres ?
18 As-tu embrassé du regard |l’étendue de la terre ?
Dis-le, si tu sais tout cela.

19 De quel côté est le chemin |vers le séjour de la lumière,
et les ténèbres, |où donc ont-elles leur demeure,
20 pour que tu puisses les saisir |là où elles se séparent[g]
et bien comprendre les sentiers |de leur habitation ?
21 Tu dois connaître tout cela, |puisque tu étais déjà né,
et que tes jours sont si nombreux !

22 As-tu visité les greniers |qui recèlent la neige,
et les dépôts de grêle, |les as-tu vus ?
23 Je les tiens en réserve |pour les temps de détresse,
les jours de lutte et de combat[h].

24 Par quelle voie |se répand la lumière ?
Par où le vent d’orient |envahit-il la terre ?
25 Qui ouvre le passage |pour les torrents de pluie ?
Qui a frayé la voie |aux éclairs de l’orage |tonitruant,
26 faisant tomber la pluie |sur une terre inhabitée,
sur un désert inoccupé,
27 pour arroser les solitudes |et les régions arides,
et pour y faire germer l’herbe ?
28 La pluie a-t-elle un père ?
Et qui donc a fait naître |les gouttes de rosée ?
29 De quel sein sort la glace,
qui a donné naissance |au blanc frimas du ciel,
30 lorsque les eaux durcissent |pour devenir comme la pierre
et que se fige |la surface des lacs profonds ?

31 Peux-tu nouer |les cordes des Pléiades
ou desserrer |les cordages d’Orion[i] ?
32 Fais-tu paraître |les constellations en leur temps ?
Conduis-tu la Grande Ourse |et ses étoiles secondaires ?
33 Sais-tu par quelles lois |le ciel est gouverné ?
Est-ce toi qui imposes |son pouvoir sur la terre ?
34 Te suffit-il |de parler aux nuages
pour que des trombes d’eau |se déversent sur toi ?
35 Les éclairs partent-ils |à ton commandement
te disant : « Nous voici » ?
36 Qui a implanté la sagesse |au cœur de l’homme
et le discernement |en son esprit[j] ?
37 Qui a la compétence |pour compter les nuages
et qui peut incliner |les amphores du ciel
38 pour agréger |en glèbe la poussière,
et pour coller |les mottes de la terre ?

Dieu évoque le règne animal

39 Peux-tu chasser la proie |pour la lionne ?
Apaises-tu la faim |des lionceaux
40 quand ils sont tous tapis |au fond de leurs tanières,
quand ils sont à l’affût |dans les taillis épais ?
41 Qui donc prépare |au corbeau sa pâture
quand ses oisillons crient vers Dieu,
et sont errants, sans nourriture ?

39 Connais-tu le moment |où les chamois enfantent ?

Et as-tu observé |les biches en travail ?
As-tu compté combien de mois |dure leur gestation ?
Et connais-tu l’époque |où elles mettent bas,
quand elles s’accroupissent, |déposent leurs petits
et sont délivrées des douleurs ?
Leurs faons se fortifient, |grandissant en plein air
et ils s’en vont loin d’elles |pour ne plus revenir.

Qui a laissé l’onagre |courir en liberté ?
Qui a rompu les liens |qui retenaient l’âne sauvage ?
Moi je lui ai donné |le désert pour demeure
et des plateaux salés[k] |pour résidence.
Il ne veut rien savoir |des villes populeuses,
et il n’entend pas les cris |du conducteur de l’âne.
Il parcourt les montagnes |pour trouver sa pâture,
à la recherche de toute verdure.

L’aurochs[l] daignera-t-il |se mettre à ton service ?
Passera-t-il ses nuits |auprès de ta mangeoire ?
10 Lui feras-tu suivre un sillon |en l’attachant avec des cordes ?
Va-t-il traîner la herse |derrière toi dans les vallons ?
11 Mettras-tu ta confiance |dans sa force extraordinaire ?
Et lui remettras-tu |le soin de tes travaux ?
12 Compteras-tu sur lui |pour rapporter ton grain
et l’amasser |sur l’aire de battage ?

13 Les ailes de l’autruche |se déploient avec joie,
mais son aile et ses plumes |ne sont pas comparables |à celles des cigognes.
14 Or l’autruche abandonne |ses œufs dans la poussière,
et laisse au sable chaud |le soin de les couver,
15 ne pensant pas à ceux |qui marcheraient dessus,
aux animaux sauvages |qui les piétineraient.
16 Elle est dure pour ses petits |comme s’ils n’étaient pas les siens,
et elle ne s’inquiète pas |d’avoir peiné en vain.
17 Pourquoi ? Parce que Dieu |l’a privée de sagesse,
et qu’il ne lui a pas donné |l’intelligence.
18 Mais qu’elle se redresse |et prenne son élan,
pour elle c’est un jeu |de laisser derrière elle |cheval et cavalier.

19 Serait-ce toi qui donnes |la puissance au cheval ?
Ou est-ce toi qui pares |son cou d’une crinière ?
20 Ou le fais-tu bondir |comme la sauterelle ?
Son fier hennissement |inspire la frayeur !
21 Dans le vallon, il piaffe, |tout joyeux de sa force.
Le voilà qui s’élance |en plein dans la mêlée.
22 Il se rit de la peur |et ne s’effraie de rien.
Il ne recule pas |en face de l’épée,
23 lorsqu’au-dessus de lui |cliquette le carquois,
la lance étincelante |ou bien le javelot.
24 Tout frémissant d’ardeur, |il dévore l’espace,
il ne tient plus en place |dès qu’il a entendu |le son du cor.
25 Dès qu’il entend la charge, |il hennit : « En avant »,
lorsqu’il est loin encore, |il flaire la bataille,
la voix tonitruante |des commandants de troupes |et les cris des guerriers.

26 Serait-ce grâce |à ton intelligence |que l’épervier prend son essor
et qu’il déploie ses ailes |en direction du sud[m] ?
27 Serait-ce à ton commandement |que l’aigle monte dans les airs
et qu’il bâtit son nid |sur les sommets ?
28 Il fait du rocher sa demeure |et y passe la nuit,
il établit sa forteresse |sur une dent rocheuse.
29 De là-haut, il épie sa proie,
de loin, il l’aperçoit.
30 Ses petits s’abreuvent de sang.
Où que soient les cadavres, |il est présent[n].

Première réponse de Job à Dieu

40 L’Eternel demanda alors à Job :

Celui qui intente un procès |au Tout-Puissant |a-t-il à critiquer ?
Celui qui conteste avec Dieu |a-t-il quelque chose à répondre ?
Job répondit alors à l’Eternel :
Je suis trop peu de chose, |que te répliquerais-je ?
Je mets donc la main sur la bouche.
J’ai parlé une fois, |je ne répondrai plus.
Et j’ai même insisté |une deuxième fois, |je n’ajouterai rien.

Second discours de Dieu

Dieu évoque l’hippopotame et le crocodile

Alors, du sein de la tempête, |l’Eternel dit à Job :
Mets ta ceinture comme un brave,
je vais te poser des questions |et tu m’enseigneras.
Veux-tu vraiment prétendre |que je ne suis pas juste ?
Veux-tu me condamner |pour te justifier ?
As-tu un bras |tel que celui de Dieu ?
Ta voix peut-elle |égaler mon tonnerre ?
10 Va te parer |d’honneur et de grandeur
et revêts-toi |de splendeur et de gloire[o] !
11 Répands les flots |de ton indignation
et, d’un regard, |courbe tous les hautains !
12 Que ton regard |les fasse plier tous,
les criminels, |écrase-les sur place !
13 Dans la poussière, |va les enfouir ensemble !
Enferme-les |dans la nuit du tombeau !
14 Alors, moi-même |je te rendrai hommage,
car ta victoire |sera due à ta main.

15 Regarde donc l’hippopotame[p] : |je l’ai fait comme toi.
Comme le bœuf, |il se nourrit de l’herbe.
16 Vois quelle force |réside dans sa croupe !
Quelle vigueur |dans ses muscles des flancs !
17 Sa queue, il la raidit, |solide comme un cèdre.
Et les tendons |sont tressés dans ses cuisses.
18 Ses os ressemblent |à des barreaux de bronze,
son ossature |à des barres de fer.
19 C’est le chef-d’œuvre |de Dieu, son créateur
qui lui impose |le respect par le glaive.
20 Les monts produisent son fourrage,
là où s’ébattent |les animaux sauvages.
21 Il dort sous les lotus,
sous le couvert |des roseaux du marais.
22 Il est couvert |par l’ombre des lotus,
les peupliers l’entourent |près des cours d’eau.
23 Si la rivière se déchaîne, |il ne s’en émeut pas.
Si le Jourdain |se jette dans sa gueule, |il reste néanmoins serein.
24 Va-t-on le prendre |à face découverte
et l’entraver |en lui perçant le mufle ?

25 Iras-tu prendre |avec ton hameçon |le crocodile[q] ?
Vas-tu lier |sa langue avec ta ligne ?
26 Lui mettras-tu |un jonc dans les naseaux ?
Perceras-tu |d’un crochet sa mâchoire ?
27 Et t’adressera-t-il |de nombreuses supplications ?
Te dira-t-il |des gentillesses ?
28 Conclura-t-il |une alliance avec toi ?
Le prendras-tu |pour serviteur à vie ?
29 Joueras-tu avec lui |comme avec un oiseau ?
Le lieras-tu |pour amuser tes filles ?
30 Des associés |le mettront-ils en vente ?
Le partageront-ils |entre des commerçants ?
31 Vas-tu cribler |de dards sa carapace ?
Vas-tu barder |sa tête de harpons ?
32 Attaque-le
et tu te souviendras |de ce combat, |tu n’y reviendras plus !

41 Vois, devant lui, |tout espoir de le vaincre |est illusoire.

A sa vue seule, |on sera terrassé.
Nul n’aura assez de courage |pour l’exciter.
Qui donc alors |pourrait me tenir tête ?
Qui m’a prêté |pour que j’aie à lui rendre ?
Tout est à moi |sous l’étendue du ciel[r].
Je ne veux pas |me taire sur ses membres,
et je dirai sa force, |et la beauté |de sa constitution.
Qui a ouvert |par-devant son habit[s] ?
Qui a franchi |les deux rangs de ses dents ?
Qui a forcé |les battants de sa gueule ?
Ses crocs aigus |font régner la terreur.
Majestueuses |sont ses rangées d’écailles,
et tels des boucliers |scellés entre eux,
serrées les unes |contre les autres,
de sorte qu’aucun souffle |ne pourrait se glisser entre elles :
soudées ensemble, |chacune à sa voisine,
elles se tiennent |et sont inséparables.

10 Il éternue : |c’est un jet de lumière[t].
Ses yeux ressemblent |aux lueurs de l’aurore[u].
11 Des étincelles |jaillissent de sa gueule,
ce sont des gerbes |de flammes qui s’échappent.
12 De ses narines |la fumée sort en jets
comme d’une marmite |ou d’un chaudron bouillant.
13 Son souffle embrase |comme un charbon ardent
et, de sa gueule, |une flamme jaillit.
14 C’est dans son cou |que sa vigueur réside,
et la terreur |danse au-devant de lui.
15 Qu’ils sont massifs, |les replis de sa peau !
Soudés sur lui, |ils sont inébranlables.
16 Son cœur est dur, |figé comme une pierre
il est durci |comme une meule à grain.

17 Quand il se dresse[v], |les plus vaillants ont peur.
Ils se dérobent, |saisis par l’épouvante.
18 L’épée l’atteint |sans trouver nulle prise[w],
et il en va de même de la lance, |de la flèche ou du javelot.
19 Pour lui, le fer |est comme de la paille,
il prend le bronze |pour du bois vermoulu.
20 Les traits de l’arc |ne le font jamais fuir
et les cailloux |qu’on lance avec la fronde |ne sont pour lui |que des fétus de paille.
21 Oui, la massue |est pour lui un fétu de paille,
et il se rit |du sifflement des lances.
22 Son ventre, armé |de tessons acérés,
est une herse |qu’il traîne sur la boue.

23 Les eaux profondes, |il les fait bouillonner |comme un chaudron.
Il transforme le lac, |lorsqu’il y entre, |en un brûle-parfum.
24 Sur son passage |son sillage étincelle.
Les flots paraissent |couverts de cheveux blancs.
25 Nul n’est son maître |ici-bas sur la terre.
Il fut créé |pour ne rien redouter.
26 Il brave tous les grands colosses.
Il est le roi |des plus fiers animaux.

Seconde réponse de Job à Dieu

42 Job répondit alors à l’Eternel :

Je sais que tu peux tout,
et que rien ne peut faire obstacle |à tes projets.
« Qui ose, disais-tu, |obscurcir mes desseins |par des discours sans connaissance ? »
Oui, j’ai parlé sans les comprendre
de choses merveilleuses |qui me dépassent, |que je ne connais pas[x].
« Ecoute, disais-tu, |c’est moi qui parlerai :
je vais te poser des questions, |et tu m’enseigneras. »
Jusqu’à présent |j’avais seulement entendu |parler de toi.
Mais maintenant, |mes yeux t’ont vu.
Aussi je me condamne, |je regrette mon attitude
en m’humiliant |sur la poussière et sur la cendre[y].

Épilogue

Après avoir dit ces choses à Job, l’Eternel s’adressa à Eliphaz de Témân et lui dit : Je suis très en colère contre toi et tes deux amis, car contrairement à mon serviteur Job, vous n’avez pas parlé de moi correctement. Procurez-vous donc maintenant sept taureaux et sept béliers[z], et allez trouver mon serviteur Job. Vous offrirez ces animaux pour vous en holocauste. Et mon serviteur Job priera pour vous. C’est par égard pour lui que je ne vous traiterai pas selon votre folie. Car, contrairement à mon serviteur Job, vous n’avez pas parlé de moi correctement.

Eliphaz de Témân, Bildad de Shouah et Tsophar de Naama allèrent accomplir ce que l’Eternel leur avait demandé. L’Eternel eut égard à la prière de Job. 10 Puis, lorsque Job eut prié pour ses amis, l’Eternel le rétablit dans son ancienne condition. Il donna même à Job deux fois autant des biens qu’il avait possédés.

11 Tous les frères et sœurs de Job, et toutes ses connaissances vinrent lui rendre visite. Ils partagèrent un repas avec lui dans sa maison ; ils le consolèrent et ils lui témoignèrent toute leur compassion pour tous les malheurs que l’Eternel lui avait envoyés. Chacun d’entre eux lui donna une pièce d’argent[aa] et un anneau d’or.

12 L’Eternel bénit le reste de la vie de Job plus que la première partie, si bien qu’il posséda quatorze mille moutons et chèvres et six mille chameaux, mille paires de bœufs et mille ânesses. 13 Il eut aussi sept fils et trois filles. 14 Il nomma la première Yemima (Tourterelle), la deuxième eut pour nom Qetsia (Fleur-de-cannelle) et la troisième Qérèn-Happouk (Fard-à-paupières). 15 On ne pouvait trouver dans le pays entier des femmes aussi belles que les filles de Job. Leur père leur donna une part d’héritage au même titre qu’à leurs frères.

16 Après cela, Job vécut encore cent quarante ans, de sorte qu’il vit ses descendants jusqu’à la quatrième génération. 17 Puis Job mourut âgé et rassasié de jours[ab].

Footnotes

  1. 38.3 Voir 42.3-4.
  2. 38.4 Dans les v. 4-6, l’auteur parle de la terre comme d’un édifice.
  3. 38.7 Expression qui peut être prise dans son sens propre (comme dans Ps 148.3) ou dans un sens figuré (comme dans Es 14.12) comme désignant les anges dont parle la fin du verset. C’est le matin de la création qu’acclament les premières créatures.
  4. 38.7 Appelés ici fils de Dieu (voir notes 1.6 ; 2.1 et Ps 29.1).
  5. 38.13 La terre est comparée au tapis que l’on secoue le matin hors de la tente pour en chasser la poussière.
  6. 38.14 L’argile servait de cire, on y imprimait son sceau, lui donnant du relief. La lumière a le même effet sur le paysage.
  7. 38.20 C’est-à-dire à la limite du jour et de la nuit.
  8. 38.23 Voir Jos 10.11 ; Ps 18.13-14 ; Es 28.17 ; 30.30.
  9. 38.31 Voir 9.9.
  10. 38.36 La traduction des deux mots cœur et esprit est incertaine. Certains pensent qu’ils désignent l’ibis et le coq, le premier oiseau annonçant la venue du printemps, le second celle de l’aurore.
  11. 39.6 Les terres salées sont opposées aux terres à fruits (Ps 107.34). L’âne sauvage se nourrit des herbes salées croissant dans les steppes d’Arabie et de Syrie.
  12. 39.9 L’urus ou l’aurochs, variété éteinte aujourd’hui, était un animal grand et puissant, souvent pris comme symbole de la force (Nb 23.22 ; 24.8 ; Dt 33.17).
  13. 39.26 L’épervier migrateur s’arrête dans cette région au cours de son vol vers le sud au début de l’hiver.
  14. 39.30 Voir Mt 24.28 ; Lc 17.37.
  15. 40.10 Voir Ps 96.6 ; 104.1 ; 111.3.
  16. 40.15 La plupart des interprètes identifient l’animal dont il est question ici à l’hippopotame du Nil, décrit aux v. 16-24 dans un langage poétique et hyperbolique.
  17. 40.25 Voir note 3.8.
  18. 41.3 Cité en Rm 11.35.
  19. 41.5 Sa carapace est comparée à une cuirasse couvrant son corps.
  20. 41.10 Par sa respiration et ses éternuements, de fines gouttelettes sont projetées en l’air ; éclairées par les rayons du soleil, elles font l’effet de jets de lumière.
  21. 41.10 Dans l’écriture hiéroglyphique, l’aurore est représentée par des yeux de crocodile.
  22. 41.17 Autre traduction : Devant sa majesté.
  23. 41.18 Autre traduction : Pour celui qui l’approche, l’épée ne sert à rien.
  24. 42.3 Pour les v. 3-4, voir Job 38.2-3.
  25. 42.6 Marques de deuil.
  26. 42.8 Voir note 1.5.
  27. 42.11 En hébreu : une qésita, monnaie correspondant à un certain poids d’argent, terme qui ne se retrouve que dans Gn 33.19 ; Jos 24.32.
  28. 42.17 Voir 5.26 ; Gn 15.15 ; 25.8.