Récits sous la domination babylonienne

A la cour du roi de Babylone

La troisième année du règne de Yehoyaqim, roi de Juda[a], Nabuchodonosor, roi de Babylone, vint assiéger Jérusalem. Le Seigneur lui donna la victoire sur Yehoyaqim et lui livra une partie des objets du Temple. Nabuchodonosor les fit transporter en Babylonie, dans le temple de son dieu et il déposa ces objets dans la salle du trésor de son dieu[b].

Le roi ordonna à Ashpenaz, chef de son personnel, de faire venir des Israélites de lignée royale ou de famille noble, quelques jeunes gens sans défaut physique et de belle apparence. Ils devaient être doués d’intelligence, de sagesse dans tous les domaines, posséder de grandes connaissances, être capables d’apprendre la science et de bonne constitution pour entrer au service du palais royal et apprendre la langue et la littérature des Chaldéens. Le roi leur prescrivit pour chaque jour une part des mets de la table royale et du vin dont il buvait lui-même. Leur formation devait durer trois ans, après quoi ils entreraient au service personnel du roi.

Parmi les Judéens qui furent sélectionnés se trouvaient Daniel, Hanania, Mishaël et Azaria. Le chef du personnel leur attribua de nouveaux noms, il appela Daniel Beltshatsar, Hanania Shadrak, Mishaël Méshak et Azaria Abed-Nego[c].

Daniel prit dans son cœur la résolution de ne pas se rendre impur en consommant les mets du roi et en buvant de son vin. Il supplia le chef du personnel de ne pas l’obliger à se rendre impur[d]. Et Dieu lui accorda la faveur du chef du personnel et lui fit trouver en lui quelqu’un de compréhensif. 10 Mais celui-ci dit à Daniel : Je crains mon seigneur le roi qui a prescrit ce que vous devez manger et boire. Si jamais il trouvait que vous avez l’air d’être en moins bonne santé que les autres jeunes gens de votre âge, à cause de vous, le roi me tiendrait pour coupable, au prix de ma tête.

11 Alors Daniel parla à l’intendant auquel le chef du personnel avait confié la responsabilité de prendre soin de lui, ainsi que de Hanania, de Mishaël et d’Azaria. 12 Il lui proposa : Fais, je te prie, un essai, avec nous, tes serviteurs, pendant dix jours : qu’on nous serve seulement des légumes à manger et de l’eau à boire. 13 Ensuite, tu compareras nos mines avec celles des jeunes gens qui mangent les mets du roi. Après cela, tu décideras d’agir envers nous selon ce que tu auras constaté.

14 L’intendant accepta leur proposition et fit un essai pendant dix jours.

15 Et au bout de ces dix jours, il était manifeste qu’ils avaient meilleure mine et qu’ils étaient en meilleure forme physique que tous les jeunes gens qui mangeaient les mets du roi. 16 Dès lors, l’intendant mit de côté les mets et le vin qui leur étaient destinés et leur fit servir seulement des légumes. 17 Dieu accorda à ces quatre jeunes gens le savoir et la compréhension de toute la littérature et de la sagesse. De plus, Daniel savait interpréter toutes les visions et tous les rêves.

18 A la fin de la période fixée par le roi, le chef du personnel introduisit les jeunes gens en présence de Nabuchodonosor. 19 Le roi s’entretint avec eux et, de tous les jeunes gens qui lui furent présentés, il n’en trouva aucun comme Daniel, Hanania, Mishaël et Azaria. C’est pourquoi ils entrèrent au service personnel du roi. 20 Chaque fois que le roi les consultait sur une question exigeant de la sagesse et du discernement, il les trouvait dix fois supérieurs à tous les mages et magiciens de son royaume. 21 Daniel demeura à la cour de Babylone jusqu’à la première année du règne du roi Cyrus[e].

Le rêve de la statue brisée

La deuxième année du règne de Nabuchodonosor, le roi fit un rêve qui le troubla au point qu’il en perdit le sommeil.

Il ordonna de convoquer les mages, les magiciens, les sorciers et les astrologues pour qu’ils lui révèlent ses rêves. Ils vinrent et se tinrent devant le roi.

Celui-ci leur dit : J’ai fait un rêve et mon esprit est tourmenté par le désir de savoir ce que c’était.

Les astrologues dirent au roi en langue araméenne[f] : Que le roi vive éternellement ! Raconte le rêve à tes serviteurs, et nous t’en donnerons l’interprétation.

Le roi répondit aux astrologues : Ma décision est ferme : si vous ne me révélez pas le contenu du rêve et son interprétation, vous serez mis en pièces et vos maisons seront réduites en tas de décombres. Mais si vous me les révélez, je vous comblerai de cadeaux, de dons et de grands honneurs. Exposez-moi donc mon rêve et ce qu’il signifie.

Ils dirent pour la seconde fois au roi : Que Sa Majesté raconte le rêve à ses serviteurs, et nous lui en donnerons l’interprétation.

Le roi rétorqua : Je vois ce qu’il en est : il est clair que vous cherchez à gagner du temps parce que vous avez compris que ma décision est fermement arrêtée. Si vous ne me faites pas connaître le rêve, une seule et même sentence vous frappera. Vous vous êtes mis d’accord pour me débiter quelque discours mensonger et trompeur en espérant qu’avec le temps la situation changera. C’est pourquoi, dites-moi ce que j’ai rêvé et je saurai que vous êtes aussi capables de m’en donner l’interprétation.

10 Les astrologues reprirent la parole devant le roi et dirent : Il n’est personne au monde qui puisse faire connaître à Sa Majesté ce qu’elle demande. Aussi, jamais roi, si grand et si puissant qu’il ait été, n’a exigé pareille chose d’aucun mage, magicien ou astrologue. 11 Ce que le roi demande est trop difficile et il n’y a personne qui soit capable de révéler cette chose au roi, excepté les dieux, mais eux, ils n’habitent pas parmi les mortels.

12 Là-dessus le roi s’irrita et entra dans une colère violente. Il ordonna de mettre à mort tous les sages de Babylone. 13 Lorsque le décret de tuer les sages fut publié, on rechercha aussi Daniel et ses compagnons pour les mettre à mort.

Dieu révèle la signification du rêve à Daniel

14 Alors Daniel s’adressa avec sagesse et tact à Aryok, le chef des gardes du roi, qui s’apprêtait à tuer les sages de Babylone.

15 Il demanda à Aryok, l’officier du roi : Pourquoi le roi a-t-il promulgué une si terrible sentence ?

Alors Aryok lui exposa l’affaire.

16 Daniel se rendit auprès du roi et le pria de lui accorder un délai, en lui disant qu’il lui ferait alors connaître l’interprétation demandée. 17 Puis il rentra chez lui et informa ses compagnons Hanania, Mishaël et Azaria de ce qui s’était passé, 18 en leur demandant de supplier le Dieu des cieux que, dans sa grâce, il leur révèle ce secret afin qu’on ne le fasse pas périr, ses compagnons et lui, avec le reste des sages de Babylone. 19 Au cours de la nuit, dans une vision, le secret fut révélé à Daniel. Alors celui-ci bénit le Dieu des cieux. 20 Il dit :

Béni soit Dieu
dès maintenant et à toujours,
car à lui appartiennent |la sagesse et la force.
21 Il fait changer les temps |et modifie les circonstances,
il renverse les rois
et établit les rois,
il donne la sagesse aux sages
et, à ceux qui savent comprendre, |il accorde la connaissance.
22 Il dévoile des choses |profondes et secrètes,
il sait ce qu’il y a |dans les ténèbres,
et la lumière brille auprès de lui.
23 C’est toi, Dieu de mes pères,
que je célèbre et que je loue,
tu m’as rempli |de sagesse et de force
et tu m’as fait connaître |ce que nous t’avons demandé,
tu nous as révélé |ce que le roi demande.

Le colosse aux pieds d’argile

24 Après cela, Daniel alla trouver Aryok, que le roi avait chargé de faire périr les sages de Babylone et il lui dit : Ne fais pas mourir les sages de Babylone. Introduis-moi en présence du roi et je lui révélerai l’interprétation de son rêve.

25 Alors Aryok s’empressa d’introduire Daniel auprès du roi et dit à celui-ci : J’ai trouvé parmi les déportés de Juda un homme qui donnera à Sa Majesté l’interprétation de son rêve.

26 Le roi s’adressa à Daniel, surnommé Beltshatsar, et lui demanda : Es-tu vraiment capable de me révéler le rêve que j’ai eu et de m’en donner l’interprétation ?

27 Daniel s’adressa au roi et lui dit : Le secret que Sa Majesté demande, aucun sage, aucun magicien, aucun mage, aucun astrologue n’est capable de le lui faire connaître. 28 Mais il y a, dans le ciel, un Dieu qui révèle les secrets ; et il a fait savoir au roi Nabuchodonosor ce qui doit arriver dans les temps à venir. Eh bien, voici ce que tu as rêvé et quelles sont les visions que tu as eues sur ton lit : 29 pendant que tu étais couché, ô roi, tu t’es mis à penser à l’avenir. Alors celui qui révèle les secrets t’a fait connaître ce qui doit arriver. 30 Quant à moi, ce n’est pas parce que je posséderais une sagesse supérieure à celle de tous les autres hommes que ce secret m’a été révélé, mais c’est afin que l’interprétation en soit donnée au roi et que tu comprennes ce qui préoccupe ton cœur.

31 Voici donc, ô roi, la vision que tu as eue : tu as vu une grande statue. Cette statue était immense, et d’une beauté éblouissante. Elle était dressée devant toi et son aspect était terrifiant. 32 La tête de cette statue était en or pur, la poitrine et les bras en argent, le ventre et les hanches en bronze, 33 les jambes en fer, les pieds partiellement en fer et partiellement en argile. 34 Pendant que tu étais plongé dans ta contemplation, une pierre se détacha[g] sans l’intervention d’aucune main, vint heurter la statue au niveau de ses pieds de fer et d’argile, et les pulvérisa. 35 Du même coup furent réduits ensemble en poussière le fer, l’argile, le bronze, l’argent et l’or, et ils devinrent comme la bale de blé qui s’envole de l’aire en été ; le vent les emporta sans en laisser la moindre trace. Quant à la pierre qui avait heurté la statue, elle devint une immense montagne et remplit toute la terre.

36 Voilà ton rêve. Quant à ce qu’il signifie, nous allons l’exposer au roi. 37 Toi, ô roi, tu es le roi des rois, à qui le Dieu des cieux a donné la royauté, la puissance, la force et la gloire. 38 Dieu a placé sous ton autorité les hommes, les bêtes sauvages et les oiseaux en quelque lieu qu’ils habitent. Il t’a donné la domination sur eux tous. C’est toi qui es la tête d’or. 39 Après toi surgira un autre empire, moins puissant que le tien, puis un troisième représenté par le bronze, qui dominera toute la terre[h]. 40 Un quatrième royaume lui succédera, il sera dur comme le fer ; comme le fer pulvérise et écrase tout et le met en pièces, ainsi il pulvérisera et mettra en pièces tous les autres royaumes. 41 Et si tu as vu les pieds et les orteils partiellement en argile et partiellement en fer, cela signifie que ce sera un royaume divisé ; il y aura en lui quelque chose de la dureté du fer, selon que tu as vu le fer mêlé à la terre cuite. 42 Mais comme les orteils des pieds étaient en partie de fer et en partie d’argile, ce royaume sera en partie fort et en partie fragile. 43 Que tu aies vu le fer mêlé de terre cuite, cela signifie que les hommes chercheront à s’unir par des alliances, mais ils ne tiendront pas ensemble, pas plus que le fer ne tient à l’argile.

44 A l’époque de ces rois-là, le Dieu des cieux suscitera un royaume qui ne sera jamais détruit et dont la souveraineté ne passera pas à un autre peuple ; il pulvérisera tous ces royaumes-là et mettra un terme à leur existence, mais lui-même subsistera éternellement. 45 C’est ce que représente la pierre que tu as vue se détacher de la montagne sans l’intervention d’aucune main humaine pour venir pulvériser le fer, le bronze, l’argile, l’argent et l’or. Le grand Dieu a révélé au roi ce qui arrivera dans l’avenir. Ce qu’annonce le rêve est chose certaine, et son interprétation est digne de foi.

46 Alors le roi Nabuchodonosor se jeta la face contre terre et se prosterna devant Daniel, il ordonna de lui offrir des offrandes et des parfums. 47 Puis il lui déclara : Il est bien vrai que votre Dieu est le Dieu des dieux, le souverain des rois et celui qui révèle les secrets, puisque tu as pu me dévoiler ce secret.

48 Le roi éleva Daniel à une haute position et lui donna de nombreux et riches présents ; il le nomma gouverneur de toute la province de Babylone et l’institua chef suprême de tous les sages de Babylone. 49 A la demande de Daniel, le roi confia l’administration de la province de Babylone à Shadrak, Méshak et Abed-Nego, et Daniel lui-même demeura à la cour du roi.

Trois jeunes Juifs dans la fournaise

La statue d’or

Le roi Nabuchodonosor fit faire une statue d’or de trente mètres de haut et de trois mètres de large. Il la fit ériger dans la plaine de Doura, dans la province de Babylone. Puis il convoqua les satrapes, les préfets, les gouverneurs, les conseillers, les trésoriers, les juristes, les magistrats et tous les dirigeants des provinces, pour l’inauguration de la statue qu’il avait fait dresser[i]. Alors les satrapes, les préfets, les gouverneurs, les conseillers, les trésoriers, les juristes, les magistrats et tous les dirigeants des provinces s’assemblèrent pour l’inauguration de la statue que le roi Nabuchodonosor avait érigée et ils se tinrent debout face à la statue élevée par le roi.

Un héraut proclama à voix forte : A vous, hommes de tous peuples, nations et langues, on vous fait savoir qu’au moment où vous entendrez le son du cor, du fifre, de la cithare, de la lyre, de la harpe, de la double flûte et de toutes sortes d’instruments de musique[j], vous vous prosternerez devant la statue d’or que le roi Nabuchodonosor a fait ériger, et vous l’adorerez. Celui qui refusera de se prosterner devant elle et de l’adorer sera jeté aussitôt dans la fournaise où brûle un feu ardent.

C’est pourquoi au moment où tous les gens entendirent le son du cor, du fifre, de la cithare, de la lyre, de la harpe, et de toutes sortes d’instruments de musique, ces hommes de tous peuples, de toutes nations et de toutes langues se prosternèrent et adorèrent la statue d’or que le roi Nabuchodonosor avait fait ériger.

Refus de l’idolâtrie

Sur ces entrefaites, certains astrologues vinrent porter des accusations contre les Juifs. Ils s’adressèrent au roi Nabuchodonosor et lui dirent : Que le roi vive éternellement ! 10 O roi, Sa Majesté a promulgué un édit ordonnant que tout homme se prosterne et adore la statue d’or dès qu’il entendrait le son du cor, du fifre, de la cithare, de la lyre, de la harpe, de la double flûte et de toutes sortes d’instruments de musique. 11 Cet édit précise que quiconque refusera de se prosterner et d’adorer la statue sera jeté dans la fournaise où brûle un feu ardent. 12 Or, il y a des hommes de Juda auxquels tu as confié l’administration de la province de Babylone, à savoir Shadrak, Méshak et Abed-Nego : ces hommes-là ne t’ont pas obéi, ô roi ; ils n’adorent pas tes dieux et ne se prosternent pas devant la statue d’or que tu as fait ériger.

13 Alors Nabuchodonosor s’irrita et entra dans une grande colère ; il ordonna de faire venir Shadrak, Méshak et Abed-Nego. On les amena donc devant le roi.

14 Celui-ci prit la parole et leur demanda : Est-il vrai, Shadrak, Méshak et Abed-Nego, que vous n’adorez pas mes dieux et que vous ne vous prosternez pas devant la statue d’or que j’ai érigée ? 15 Maintenant, si vous êtes prêts, au moment où vous entendrez le son du cor, du fifre, de la cithare, de la lyre, de la harpe, de la double flûte et de toutes sortes d’instruments de musique, prosternez-vous et adorez la statue que j’ai faite. Si vous refusez de l’adorer, vous serez jetés aussitôt dans la fournaise où brûle un feu ardent. Et quel est le dieu qui pourrait alors vous délivrer de mes mains ?

16 Shadrak, Méshak et Abed-Nego répondirent au roi : O Nabuchodonosor, il n’est pas nécessaire de te répondre sur ce point. 17 Si le Dieu que nous servons peut nous délivrer de la fournaise où brûle un feu ardent, ainsi que de tes mains, ô roi, qu’il nous délivre ! 18 Mais même s’il ne le fait pas, sache bien, ô roi, que nous n’adorerons pas tes dieux et que nous ne nous prosternerons pas devant la statue d’or que tu as fait ériger.

19 Alors Nabuchodonosor fut rempli de fureur contre Shadrak, Méshak et Abed-Nego, et son visage devint blême. Il reprit la parole et ordonna de chauffer la fournaise sept fois plus que d’habitude.

20 Puis il commanda à quelques soldats vigoureux de sa garde, de ligoter Shadrak, Méshak et Abed-Nego et de les jeter dans la fournaise ardemment chauffée. 21 Aussitôt les trois hommes furent ligotés tout habillés avec leurs pantalons, leurs tuniques et leurs turbans[k], et jetés dans la fournaise où brûlait un feu ardent. 22 Mais comme, sur l’ordre du roi, on avait fait chauffer la fournaise au maximum, les flammes qui en jaillissaient firent périr les soldats qui y avaient jeté Shadrak, Méshak et Abed-Nego. 23 Quant à Shadrak, Méshak et Abed-Nego, ils tombèrent tous les trois ligotés au milieu de la fournaise où brûlait un feu ardent.

Dieu intervient

24 C’est alors que le roi Nabuchodonosor fut saisi de stupeur ; il se leva précipitamment et, s’adressant à ses conseillers, il demanda : N’avons-nous pas jeté trois hommes tout ligotés dans le feu ?

Ils répondirent au roi : Bien sûr, Majesté.

25 – Eh bien, reprit le roi, je vois quatre hommes sans liens qui marchent au milieu du feu sans subir aucun dommage corporel ; et le quatrième a l’aspect d’un fils des dieux.

26 Puis Nabuchodonosor s’approcha de la porte de la fournaise où brûlait un feu ardent et se mit à crier : Shadrak, Méshak et Abed-Nego, serviteurs du Dieu très-haut, sortez de là et venez ici !

Alors, Shadrak, Méshak et Abed-Nego sortirent du milieu du feu. 27 Les satrapes, les préfets, les gouverneurs et les conseillers du roi se rassemblèrent autour de ces hommes : ils constatèrent que le feu n’avait eu aucun effet sur leurs corps, qu’aucun cheveu de leur tête n’avait été brûlé, que leurs vêtements n’avaient pas été endommagés et qu’ils ne sentaient même pas l’odeur du feu.

28 Alors Nabuchodonosor s’écria : Loué soit le Dieu de Shadrak, de Méshak et d’Abed-Nego, qui a envoyé son ange pour délivrer ses serviteurs qui se sont confiés en lui et qui ont désobéi à mon ordre. Ils ont préféré risquer leur vie plutôt que de se prosterner et d’adorer un autre dieu que le leur. 29 Voici donc ce que je décrète : Tout homme – de quelque peuple, nation ou langue qu’il soit – qui parlera d’une manière irrespectueuse du Dieu de Shadrak, de Méshak et d’Abed-Nego sera mis en pièces et sa maison sera réduite en un tas de décombres, parce qu’il n’existe pas d’autre Dieu qui puisse sauver ainsi les hommes.

30 Ensuite le roi fit prospérer Shadrak, Méshak et Abed-Nego dans la province de Babylone.

Le rêve du grand arbre

31 Le roi Nabuchodonosor adresse ce message à tous les peuples, à toutes les nations et aux gens de toutes langues qui habitent la terre entière : Que votre paix soit grande !

32 Il m’a paru bon de vous faire connaître les signes extraordinaires et les prodiges que le Dieu très-haut a accomplis envers moi.

33 « Que ses signes extraordinaires sont grands
et ses prodiges éclatants !
Son règne est un règne éternel
et sa domination |subsiste d’âge en âge. »

Moi, Nabuchodonosor, je vivais tranquille dans ma maison et je jouissais de la prospérité dans mon palais. J’ai alors fait un rêve qui m’a rempli d’effroi ; les pensées qui m’ont hanté sur mon lit et les visions de mon esprit m’ont épouvanté. J’ai donc ordonné de convoquer auprès de moi tous les sages de Babylone, pour qu’ils me fassent connaître l’interprétation de mon rêve. Les mages, les magiciens, les astrologues et les devins se sont présentés. Je leur ai exposé le rêve, mais ils n’ont pas pu m’en faire connaître l’interprétation.

A la fin, s’est présenté devant moi Daniel, nommé aussi Beltshatsar, d’après le nom de mon dieu[l]. L’esprit des dieux saints réside en lui. Je lui ai raconté mon rêve et je lui ai dit : Beltshatsar, chef des mages, je sais que l’esprit des dieux saints réside en toi, et qu’aucun mystère n’est trop difficile pour toi, écoute donc les visions que j’ai eues dans mon rêve et donne-m’en l’interprétation. Voici quelles étaient les visions de mon esprit pendant que j’étais couché sur mon lit : je regardais et voici ce que j’ai vu :

Au milieu de la terre |se dressait un grand arbre, |dont la hauteur était immense.
L’arbre grandit |et devint vigoureux.
Son sommet atteignait le ciel ;
et l’on pouvait le voir |depuis les confins de la terre.
Son feuillage était magnifique
et ses fruits abondants.
Il portait de la nourriture |pour tout être vivant.
Les animaux sauvages |venaient s’abriter à son ombre
et les oiseaux |se nichaient dans ses branches.
Tous les êtres vivants |se nourrissaient de ses produits.

10 Pendant que, sur mon lit, je contemplais les visions de mon esprit, je vis apparaître un de ceux qui veillent[m], un saint qui descendait du ciel. 11 Il cria d’une voix forte :

« Abattez l’arbre ! |Coupez ses branches !
Arrachez son feuillage |et dispersez ses fruits,
et que les animaux |s’enfuient de dessous lui,
que les oiseaux |quittent ses branches !
12 Laissez cependant dans la terre |la souche et ses racines,
liées de chaînes de fer et de bronze
au milieu de l’herbe des champs.
Qu’il soit trempé |de la rosée du ciel,
qu’il se nourrisse d’herbe |avec les animaux.
13 Cet homme perdra la raison
et se prendra pour une bête
jusqu’à ce qu’aient passé sept temps[n].
14 Cette sentence |est un décret de ceux qui veillent ;
cette résolution |est un ordre des saints,
afin que tous les vivants sachent |que le Très-Haut domine |sur toute royauté humaine,
qu’il accorde la royauté |à qui il veut,
et qu’il établit roi |le plus insignifiant des hommes. »

15 Tel est le rêve que j’ai eu, moi le roi Nabuchodonosor. Quant à toi, Beltshatsar, donne-m’en l’interprétation puisque tous les sages de mon royaume s’en sont montrés incapables ; mais toi, tu le peux, car l’esprit des dieux saints réside en toi.

Daniel interprète le rêve

16 Alors Daniel, nommé aussi Beltshatsar, demeura un moment interloqué : ses pensées l’effrayaient. Le roi reprit et dit : Beltshatsar, que le songe et son explication ne t’effraient pas !

– Mon Seigneur, répondit Beltshatsar, je souhaiterais que ce songe s’applique à tes ennemis, et sa signification à tes adversaires !

17 Tu as vu un arbre grandir et devenir vigoureux, sa cime touchait le ciel et on le voyait de toute la terre. 18 Cet arbre au feuillage magnifique et aux fruits abondants portait de la nourriture pour tous les êtres vivants. Les animaux sauvages venaient s’abriter sous lui et les oiseaux nichaient dans ses branches. 19 Cet arbre, ô roi, c’est toi ! Car tu es devenu grand et puissant. Ta grandeur s’est accrue, elle atteint jusqu’au ciel et ta domination s’étend jusqu’aux confins de la terre. 20 Le roi a vu ensuite l’un de ceux qui veillent, un saint, descendre du ciel et crier : « Abattez l’arbre et détruisez-le ! Laissez toutefois en terre la souche avec les racines, mais liées de chaînes de fer et de bronze au milieu de l’herbe des champs, qu’il soit trempé de la rosée du ciel, et qu’il se nourrisse d’herbe avec les animaux des champs jusqu’à ce que sept temps aient passé. »

21 Voici ce que cela signifie, ô roi ! Il s’agit là d’un décret du Très-Haut prononcé contre mon seigneur le roi.

22 On te chassera du milieu des humains et tu vivras parmi les bêtes des champs. On te nourrira d’herbe comme les bœufs et tu seras trempé de la rosée du ciel. Tu seras dans cet état durant sept temps, jusqu’à ce que tu reconnaisses que le Très-Haut est le maître de toute royauté humaine et qu’il accorde la royauté à qui il lui plaît. 23 Mais si l’on a ordonné de préserver la souche avec les racines de l’arbre, c’est que la royauté te sera rendue dès que tu auras reconnu que le Dieu des cieux est souverain. 24 C’est pourquoi, ô roi, voici mon conseil : puisses-tu juger bon de le suivre ! Détourne-toi de tes péchés et fais ce qui est juste ! Mets un terme à tes injustices en ayant compassion des pauvres ! Peut-être ta tranquillité se prolongera-t-elle.

Le rêve se réalise

25 Tous ces événements s’accomplirent pour le roi Nabuchodonosor. 26 En effet, douze mois plus tard, il se promenait sur la terrasse du palais royal de Babylone.

27 Il prit la parole et dit : N’est-ce pas là Babylone la grande que moi j’ai bâtie pour en faire une résidence royale ? C’est par la grandeur de ma puissance et pour la gloire de ma majesté que j’ai fait cela.

28 Ces paroles étaient encore sur ses lèvres, qu’une voix retentit du ciel : Roi Nabuchodonosor, écoute ce qu’on te dit : le pouvoir royal t’est retiré ! 29 On te chassera du milieu des humains et tu vivras avec les bêtes des champs, on te nourrira d’herbe comme les bœufs. Tu seras dans cet état durant sept temps, jusqu’à ce que tu reconnaisses que le Très-Haut est maître de toute royauté humaine et qu’il accorde la royauté à qui il lui plaît.

30 Au même instant, la sentence prononcée contre Nabuchodonosor fut exécutée : il fut chassé du milieu des hommes, il se mit à manger de l’herbe comme les bœufs et son corps fut trempé par la rosée du ciel, sa chevelure devint aussi longue que des plumes d’aigle et ses ongles ressemblaient aux griffes des oiseaux.

31 Au terme du temps annoncé, moi, Nabuchodonosor, je levai les yeux vers le ciel, et la raison me revint. Je remerciai le Très-Haut, je louai celui qui vit éternellement, et je proclamai sa gloire :

sa souveraineté |est éternelle
son règne dure d’âge en âge.
32 Tous les habitants de la terre |ne comptent pour rien devant lui,
et il agit comme il l’entend
envers l’armée des êtres |qui vivent dans le ciel |et envers les habitants de la terre.
Personne ne peut s’opposer |à ses interventions
ou lui reprocher : « Que fais-tu ? »

33 A l’heure même, la raison me revint, la gloire de ma royauté, la majesté et la splendeur me furent rendues : mes conseillers et mes dignitaires me rappelèrent et je fus réinstallé sur mon trône avec un surcroît de grandeur. 34 Maintenant, moi, Nabuchodonosor, je loue, j’exalte et je glorifie le Roi des cieux, car il agit en accord avec ses paroles[o] et tout ce qu’il fait est juste, il a le pouvoir d’abaisser ceux qui vivent dans l’orgueil.

L’inscription sur le mur

Un festin sacrilège

Un jour, le roi Balthazar[p] organisa un banquet en l’honneur de ses mille dignitaires et se mit à boire du vin en leur présence. Excité par le vin, Balthazar ordonna d’apporter les coupes d’or et d’argent que Nabuchodonosor, son père[q], avait rapportées du temple de Jérusalem[r]. Il voulait s’en servir pour boire, lui et ses hauts dignitaires, ses femmes et ses concubines[s]. Aussitôt, on apporta les coupes d’or qui avaient été prises dans le temple de Dieu à Jérusalem, et le roi, ses hauts dignitaires, ses femmes et ses concubines s’en servirent pour boire. Ils burent et se mirent à louer les dieux d’or, d’argent, de bronze, de fer, de bois et de pierre.

Une main mystérieuse

A ce moment-là apparurent soudain, devant le candélabre, les doigts d’une main humaine qui se mirent à écrire sur le plâtre du mur du palais royal. Le roi vit cette main qui écrivait. Alors son visage devint blême, des pensées terrifiantes l’assaillirent, il se mit à trembler de tout son être et ses genoux s’entrechoquèrent. Il ordonna à grands cris de faire venir les magiciens, les astrologues et les devins, et il dit aux sages : Celui qui déchiffrera cette inscription et m’en donnera l’interprétation sera revêtu de pourpre, on lui mettra une chaîne d’or au cou et il partagera le gouvernement du royaume avec deux autres hauts fonctionnaires[t].

Tous les sages du roi entrèrent dans la salle, mais aucun d’eux ne put déchiffrer l’inscription, ni en faire connaître l’interprétation au roi. Alors le roi Balthazar fut encore plus effrayé, il pâlit davantage et ses hauts dignitaires se trouvèrent dans une grande confusion.

10 Quand la reine mère[u] entendit ce que disaient le roi et ses hauts dignitaires, elle pénétra dans la salle du festin. Elle prit la parole et dit : Que le roi vive éternellement ! Ne te laisse pas terrifier par tes pensées et que ton visage ne pâlisse pas ainsi ! 11 Il y a, dans ton royaume, un homme en qui réside l’esprit des dieux saints ; du temps de ton père[v], on trouva en lui une clairvoyance, une intelligence et une sagesse pareilles à la sagesse des dieux, aussi le roi Nabuchodonosor, ton père, l’a-t-il établi chef des mages, des magiciens, des astrologues et des devins. 12 Car cet homme, Daniel, que le roi a nommé Beltshatsar, possède un esprit extraordinaire, de la connaissance et de l’intelligence pour interpréter les rêves, trouver la solution des énigmes et résoudre les problèmes difficiles. Que l’on appelle donc Daniel et il donnera l’interprétation.

Daniel explique l’énigme

13 Aussitôt, Daniel fut introduit en présence du roi. Celui-ci prit la parole et lui dit : Es-tu ce Daniel qui fait partie des exilés de Juda, que le roi, mon père, a amenés de Juda ? 14 J’ai entendu dire que l’esprit des dieux réside en toi et que tu possèdes une clairvoyance, une intelligence et une sagesse extraordinaires. 15 Or, on vient de m’amener les sages et les magiciens pour lire cette inscription et m’en faire connaître l’interprétation ; mais ils n’en ont pas été capables. 16 On m’a dit que toi, tu peux donner des interprétations et résoudre les problèmes difficiles. Si donc tu es capable de lire cette inscription et de m’en faire connaître l’interprétation, tu seras revêtu de pourpre, tu porteras une chaîne d’or au cou et tu partageras le gouvernement du royaume avec deux autres hauts fonctionnaires[w].

17 Alors Daniel prit la parole et dit au roi : Garde tes présents et donne tes cadeaux à un autre ! Je vais cependant te déchiffrer l’inscription et t’en faire connaître l’interprétation. 18 O roi, le Dieu très-haut avait donné à Nabuchodonosor, ton père, la royauté et la grandeur, la gloire et la majesté. 19 Et à cause de la grandeur qu’il lui avait accordée, les gens de tous peuples, de toutes nations et de toutes langues tremblaient de peur devant lui. La vie et la mort de chacun dépendaient de son bon vouloir ; il élevait et abaissait qui il lui plaisait. 20 Mais lorsque son cœur s’enorgueillit et qu’il s’endurcit jusqu’à l’arrogance, on lui fit quitter son trône royal et il fut dépouillé de sa gloire. 21 Il fut chassé de la société des humains, sa raison devint semblable à celle des bêtes et il se mit à vivre en compagnie des ânes sauvages, on le nourrissait d’herbe comme les bœufs et son corps était trempé par la rosée du ciel. Cela dura jusqu’au jour où il reconnut que le Dieu très-haut est maître de toute royauté humaine et qu’il élève à la royauté qui il veut.

22 Et toi, son fils, Balthazar, tu savais tout cela, et cependant tu n’as pas adopté une attitude humble. 23 Tu t’es élevé contre le Seigneur du ciel et tu t’es fait apporter les coupes de son temple, puis toi et tes hauts dignitaires, tes femmes et tes concubines[x], vous y avez bu du vin et tu as loué les dieux d’argent, d’or, de bronze, de fer, de bois et de pierre, des dieux qui ne voient rien, n’entendent rien et ne savent rien. Mais le Dieu qui tient ton souffle de vie dans sa main et de qui dépend toute ta destinée, tu ne l’as pas honoré. 24 C’est pourquoi il a envoyé ce tronçon de main pour tracer cette inscription.

25 Voici l’inscription qui a été tracée là : « Il a été compté : une mine, un sicle et deux demi-sicles[y]. »

26 Et voici l’interprétation : « une mine » : Dieu a « compté » les années de ton règne et les a menées à leur terme.

27 « Un sicle » : Tu as été « pesé » dans la balance et l’on a trouvé que tu ne fais pas le poids.

28 « Deux demi-sicles » : Ton royaume a été « divisé » pour être livré aux Mèdes et aux Perses.

29 Alors Balthazar ordonna de revêtir Daniel de pourpre, de lui mettre une chaîne d’or au cou et de faire proclamer qu’il partagerait le gouvernement du royaume avec deux autres hauts fonctionnaires[z].

30 Mais, dans la même nuit, Balthazar, roi des Chaldéens, fut tué.

L’histoire mondiale et sa fin

Et Darius le Mède, âgé d’environ soixante-deux ans, accéda au pouvoir royal[aa].

Daniel dans la fosse aux lions

La jalousie des satrapes

Darius jugea bon de nommer cent vingt satrapes pour gouverner tout le royaume. Il plaça au-dessus d’eux trois ministres auxquels ces satrapes devaient rendre compte pour que les intérêts du roi soient préservés. Daniel était l’un de ces trois. Or, il se montrait plus capable que les deux autres ministres et tous les satrapes[ab], parce qu’il y avait en lui un esprit extraordinaire. C’est pourquoi le roi songeait à le mettre à la tête de tout le royaume.

Alors les autres ministres et les satrapes se mirent à chercher un motif d’accusation contre lui dans sa manière d’administrer les affaires de l’empire, mais ils ne purent découvrir aucun motif d’accusation, ni aucune faute, car il était fidèle, de sorte qu’on ne pouvait trouver en lui ni négligence ni faute.

Ces hommes-là conclurent donc : Nous ne trouverons aucun motif d’accusation contre ce Daniel, à moins que ce soit en relation avec la Loi de son Dieu.

Alors ces ministres et ces satrapes se précipitèrent chez le roi et lui parlèrent ainsi : Que le roi Darius vive éternellement ! Tous les ministres du royaume, les préfets et les satrapes, les conseillers et les gouverneurs réunis en conseil, ont décidé qu’il fallait publier un édit royal pour mettre en vigueur une interdiction stricte. Selon cet édit, quiconque, pendant les trente jours qui suivent, adressera une prière à quelque dieu ou quelque homme que ce soit, si ce n’est à toi, Majesté, sera jeté dans la fosse aux lions. Maintenant, Majesté, établis cette interdiction, et signe le décret afin qu’il soit irrévocable, conformément à la loi des Mèdes et des Perses qui est immuable.

10 Là-dessus, le roi Darius signa le décret portant l’interdiction.

11 Quand Daniel apprit que ce décret avait été signé, il entra dans sa maison ; les fenêtres de sa chambre haute étant ouvertes en direction de Jérusalem, trois fois par jour, il se mettait à genoux pour prier et louer son Dieu. Il continua à le faire comme auparavant. 12 Alors ces hommes firent irruption chez lui et le surprirent en train d’invoquer et d’implorer son Dieu. 13 Aussitôt, ils se rendirent chez le roi pour lui parler de l’interdiction royale : N’as-tu pas signé un décret d’interdiction, dirent-ils, stipulant que quiconque adressera, dans les trente jours, une prière à quelque dieu ou homme que ce soit si ce n’est à toi, Majesté, serait jeté dans la fosse aux lions ?

Le roi répondit : Il en est bien ainsi, conformément à la loi des Mèdes et des Perses qui est immuable.

14 – Eh bien, reprirent-ils devant le roi, Daniel, l’un des déportés de Juda, ne fait aucun cas de toi, Majesté, car il n’a pas respecté l’interdiction que tu as signée. Trois fois par jour, il fait sa prière.

15 Lorsque le roi entendit ces paroles, il fut vivement peiné et il décida de délivrer Daniel. Jusqu’au coucher du soleil, il chercha à le sauver. 16 Mais ces hommes se rendirent ensemble chez le roi et lui dirent : Sache, Majesté, que la loi des Mèdes et des Perses veut que toute interdiction et tout décret promulgués par le roi soient irrévocables.

Dans la fosse aux lions

17 Alors le roi ordonna d’emmener Daniel et de le jeter dans la fosse aux lions. Il s’adressa à Daniel et lui dit : Puisse ton Dieu que tu sers avec tant de persévérance te délivrer lui-même.

18 On apporta une grosse pierre et on la mit devant l’entrée de la fosse. Le roi y apposa son sceau avec son anneau et ceux des hauts dignitaires, afin que rien ne puisse être changé aux dispositions prises à l’égard de Daniel. 19 Après cela, le roi rentra dans son palais. Il passa la nuit sans manger et refusa tout divertissement[ac]. Et il ne parvint pas à trouver le sommeil.

20 Dès le point du jour, le roi se leva et se rendit en toute hâte à la fosse aux lions. 21 Comme il s’en approchait, il appela Daniel d’une voix angoissée : Daniel, serviteur du Dieu vivant, cria-t-il, ton Dieu que tu sers avec tant de persévérance a-t-il pu te délivrer des lions ?

22 Alors Daniel répondit au roi : O Majesté, vis éternellement ! 23 Mon Dieu a envoyé son ange qui a fermé la gueule des lions, de sorte qu’ils ne m’ont fait aucun mal, parce que j’ai été reconnu innocent devant lui – tout comme je n’ai pas commis de faute envers toi, Majesté !

24 Alors le roi éprouva une grande joie et il ordonna de hisser Daniel hors de la fosse. Daniel fut donc remonté de la fosse, et on ne trouva sur lui aucune blessure, parce qu’il avait eu confiance en son Dieu. 25 Là-dessus, le roi ordonna de lui amener ces hommes qui avaient accusé Daniel, et il les fit jeter dans la fosse aux lions, avec leurs enfants et leurs femmes ; ils n’avaient pas atteint le sol de la fosse, que déjà les lions s’emparèrent d’eux et leur broyèrent les os.

26 Alors le roi Darius écrivit aux gens de tous les peuples, de toutes les nations et de toutes langues qui habitent la terre entière :

Que votre paix soit grande !

27 Je décrète que, dans toute l’étendue de mon royaume, on tremble de crainte devant le Dieu de Daniel, car

il est le Dieu vivant
qui subsiste éternellement,
son règne ne sera jamais détruit,
sa souveraineté |durera à toujours.
28 Il délivre et il sauve,
et il accomplit des prodiges, |des signes extraordinaires
dans le ciel et sur terre,
car il a délivré Daniel |de la griffe des lions.

29 Daniel prospéra sous le règne de Darius et sous celui de Cyrus le Perse[ad].

Footnotes

  1. 1.1 C’est-à-dire, selon la manière babylonienne de compter les années, 605 av. J.-C. Voir 2 R 24.1 ; 2 Ch 36.5-7. Yehoyaqim a régné de 609 à 598 av. J.-C.
  2. 1.2 Pour les v. 2-4, voir 2 R 20.17-20 ; 24.10-16 ; 2 Ch 36.10 ; Es 39.6-7.
  3. 1.7 Ces changements de nom marquent, selon certains, le passage sous l’autorité du roi de Babylone ; pour d’autres, c’est par commodité et non par idéologie que l’on changeait le nom des étrangers (voir Gn 41.45). Beltshatsar : selon certains, « Que sa vie soit protégée », selon d’autres : « Dame (Bélet, titre de l’épouse du dieu Mardouk ou Bel, voir 4.5), protège le roi ! » Shadrak : « Je crains beaucoup (Dieu) ». Méshak : « Je suis de peu de valeur ». Abed-Nego : « Serviteur de celui qui resplendit » ou « serviteur de Nabû », dieu mésopotamien.
  4. 1.8 Afin de ne pas transgresser les prescriptions alimentaires de la Loi mosaïque concernant la viande (Lv 11 ; 17.10-16 ; 20.25). Pour ce qui est de l’abstinence de vin, elle pouvait marquer le refus d’une alliance avec Nabuchodonosor engageant à une loyauté inconditionnelle, les jeunes Juifs acceptant de servir l’empereur, mais dans certaines limites seulement.
  5. 1.21 Il s’agit de la première année du règne de Cyrus sur Babylone, c’est-à-dire en 539 ou 538 av. J.-C.
  6. 2.4 A partir de là, et jusqu’à la fin du chapitre 7, le texte original est en araméen, la langue internationale de tout le Moyen-Orient depuis le viiie siècle avant J.-C.
  7. 2.34 se détacha. L’ancienne version grecque ajoute : de la montagne (voir v. 45).
  8. 2.39 Après Babylone (v. 38) viennent l’Empire des Mèdes et des Perses établi par Cyrus (539 av. J.-C.), puis celui des Grecs fondé par Alexandre le Grand (330 av. J.-C.). Le quatrième royaume (v. 40ss) est l’empire romain. Les visions du chapitre 7 reprennent cette prophétie plus en détail.
  9. 3.2 La traduction de certains titres des fonctionnaires babyloniens reste incertaine.
  10. 3.5 L’identification de certains de ces instruments de musique est incertaine.
  11. 3.21 La traduction des noms de vêtements est incertaine.
  12. 4.5 Voir 1.7 et note.
  13. 4.10 Dans la Bible, le terme « veillants » pour désigner les anges se trouve seulement dans Daniel, mais il est fréquent dans les livres apocryphes.
  14. 4.13 Ce terme, qui peut avoir le sens de « temps » (2.8), de « moment » (3.5) ou de « saison », désigne ici très certainement une année (voir 7.25). De même dans les v. 20, 22, 29.
  15. 4.34 D’autres comprennent : il agit avec droiture.
  16. 5.1 Les événements de ce chapitre ont lieu en 539 av. J.-C., 23 ans après la mort de Nabuchodonosor (en 562 av. J.-C.). Balthazar était le fils du dernier roi de Babylone, Nabonide. Il a exercé le pouvoir à la place de son père pendant les dix dernières années de son règne, alors que Nabonide s’était retiré à Téma, une oasis de la péninsule Arabique. Aux v. 2, 11, 18, Nabuchodonosor est appelé son père, ce qui pouvait désigner en araméen soit la succession au trône soit la descendance physique. Il semble, en fait, que Balthazar ait été le petit-fils de Nabuchodonosor par sa mère ou par sa grand-mère – la femme ou la mère de Nabonide (voir 5.10 et note ; Jr 27.7).
  17. 5.2 Voir v. 1 et note, 11, 18 ; Jr 27.7.
  18. 5.2 Voir 1.2 ; 2 R 25.14-15.
  19. 5.2 Le sens de ces deux mots est incertain. On a retrouvé le second dans les papyrus d’Eléphantine en Egypte, datant du ve siècle av. J.-C., avec le sens de femmes de service.
  20. 5.7 il partagera … fonctionnaires. Certains traduisent : il occupera le troisième rang dans le gouvernement du royaume (après Nabonide et Balthazar), mais l’araméen signifie plutôt : « il gouvernera le royaume au sein d’un triumvirat » (voir 6.3).
  21. 5.10 Selon certains, elle serait fille de Nabuchodonosor, mariée à Nabonide. Les reines mères avaient une grande influence dans les cours du Moyen-Orient.
  22. 5.11 Voir 5.1 et note.
  23. 5.16 Voir note v. 7.
  24. 5.23 Voir note v. 2.
  25. 5.25 Il a été compté : … sicles. En araméen : Mené, mené, téqel, et parsin. Les deux premiers termes sont des homonymes : il vaut mieux considérer le premier mené comme une forme du verbe compter ; les trois autres termes sont des noms de monnaies. A partir de ces trois noms de monnaies, Daniel délivre un triple message, en procédant par jeux de mots avec ces noms (v. 26-28) ; ainsi le nom de la mine est homonyme à la formule verbale : il a été compté. Le nom du sicle fait jeu avec le verbe peser. Le nom du demi-sicle fait jeu à la fois avec le verbe diviser et avec le nom des Perses ; autre traduction pour demi-sicles : demi-mines.
  26. 5.29 Voir v. 7 et note.
  27. 6.1 Darius le Mède (9.1 ; 11.1) : il faut distinguer ce personnage de Darius Ier Hystaspe (522 à 486 av. J.-C.). Il y a de bonnes raisons de l’identifier à Ugbaru, encore nommé « Gubaru » (ou Gobryas), le général qui a pris la ville de Babylone. Il aurait été nommé par Cyrus roi vassal de Babylone. Une autre solution fait de « Darius le Mède » le nom babylonien d’intronisation de Cyrus après sa conquête de la ville en 539 av. J.-C. On peut alors adopter l’autre traduction indiquée en note pour le v. 29 (voir, en 1 Ch 5.26 et note, un même phénomène pour Tiglath-Piléser, roi d’Assyrie).
  28. 6.4 Voir Est 1.1 et note.
  29. 6.19 divertissement : terme de sens incertain. Autres traductions proposées : table, nourriture, parfums, concubines.
  30. 6.29 Autre traduction : sous le règne de Darius – c’est-à-dire de Cyrus le Perse (voir note 6.1).